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« Le sport, c'est bon pour les salariés comme pour les entreprises »
Interview de Quentin Hurel, conseiller technique fédéral de la ligue de Normandie à la Fédération Française du Sport en Entreprise. La FFSE* se positionne comme une passerelle entre l’entreprise et le monde du sport pour l’aide au développement de pratiques physiques et sportives.
Qu’est-ce que les dirigeants ont à gagner à encourager les pratiques sportives ?
Quentin Hurel : Les motivations des directions d’entreprise peuvent être très différentes. Les dirigeants peuvent vouloir agir sur la prévention des risques professionnels et la préservation de la santé de leurs salariés. Les actions organisées par l’entreprise sont, dans ce cadre, inscrites au document unique d’évaluation des risques professionnels. Cela peut-être aussi la volonté du management de créer une meilleure ambiance au sein de l’entreprise pour encourager, par exemple, le travail d’équipe car le sport permet de créer du lien social. Les Directeurs des Ressources Humaines peuvent aussi avoir pour objectif de réduire le stress au travail en améliorant le bien-être de leurs collaborateurs. Les actions que l’on peut leur proposer s’adaptent à l’activité professionnelle. Quand le travail est déjà physique, on ne suggère pas de faire du sport mais de l’éveil musculaire en début de journée pour lutter contre les TMS, les troubles musculosquelettiques. Inversement, dans le cadre d’un travail sédentaire, l’activité physique, au moment de la pause méridienne, fonctionne bien. On a, par exemple, installé des salles de sport dans les CHU, les centre hospitalier universitaire, de Caen et de Rouen en sélectionnant les machines et types d’exercices qui conviennent le mieux au personnel. Il faut souligner que la sensibilité des dirigeants ou des DRH à l’utilité du sport favorise fortement sa pratique en entreprise.
Quelles formes peut prendre le sport en entreprise ?
QH : Les pratiques sont multiples mais leurs effets induits sont aussi très variables. Prenons un exemple très connu : l’abonnement à un club de sport remboursé par le Comité Économique et Social de l’entreprise. Cela fonctionne : les salariés bougent, font du sport, mais sans que cela créé du lien social dans l’entreprise. Ce n’est clairement pas une formule que nous recommandons. À l’inverse, les entreprises qui disposent de plus de moyens peuvent décider d’ouvrir une salle de sport. L’enjeu est d’animer cet équipement pour inciter le plus grand nombre, et pas seulement les sportifs, à l’utiliser. L’objectif est clairement de lutter contre la sédentarité qui est, rappelons-le, est la première cause de mortalité dans le monde avant le tabagisme.
Avec quelle méthodologie d’intervention ?
QH : On cherche tout d’abord à identifier la motivation principale de l’entreprise mais aussi les attentes et besoins des salariés. La réponse n’est pas la même si l’on veut diminuer les TMS ou augmenter le bien-être en entreprise. Pour choisir les meilleures solutions, nous faisons un diagnostic de la structure pour repérer les freins à la pratique sportive et les solutions envisageables. C’est une phase essentielle pour pérenniser la pratique sportive dans l’entreprise. Une fois lancées, nous cherchons à suivre les actions conduites en interrogeant les salariés d’une année sur l’autre. On veille aussi à entretenir les dynamiques en organisant des conférences sur des thèmes liés à la santé ou à la nutrition notamment, ou des opérations de team building pour entretenir la pratique sportive.
La pratique régulière du sport en entreprise fait baisser le taux de turn-over et d'absentéisme
Nos recommandations varient bien évidemment en fonction de la nature de la demande (une action ponctuelle ou sur la durée, une sensibilisation du personnel ou l’accompagnement à la pratique sportive), et des moyens de l’entreprise (le montant du budget alloué et la nature des infrastructures existantes). On fait donc du sur-mesure. Sans parti pris. Un événement d’une journée comme la participation à une course à pied peut-être un facteur pouvant créer une dynamique dans l’entreprise pour susciter ensuite un engagement sur la durée. Il est préférable d’y aller pas à pas plutôt que de créer de la frustration en mettant fin à des pratiques installées. Il faut aussi préciser que l’on informe les entreprises sur la prise en charge financière de ces actions : leur éligibilité au titre des fonds dédiés à la formation ou les aides mobilisables comme celles de mutuelles pour le financement d’équipements…
Quels sont les freins les plus fréquents à la pratique du sport en entreprise ?
QH : Les freins peuvent être de toutes sortes. L’état des infrastructures et, en premier lieu, l’absence de douche au travail, peuvent dissuader de faire du sport. Face à cette réalité, on peut proposer des activités physiques comme le yoga ou la sophrologie que l’on peut pratiquer dans une salle de réunion classique en poussant simplement les tables. Mais ce n’est pas satisfaisant. Les entreprises devraient disposer de douches en nombre suffisant pour permettre à tous ceux qui le souhaitent de pouvoir pratiquer l’activité de leur choix avant ou après le travail mais aussi pendant la pause déjeuner. Face à ce déficit d’équipement qui révèle un problème de culture du sport, nous devons imaginer d’autres solutions comme, par exemple, le partage d’équipements entre plusieurs entreprises. Nous pouvons les aider à trouver des clubs de sport à proximité disposant de tout le confort nécessaire. Par ailleurs, il existe en Normandie une nouvelle forme de sport d’entreprise, la Plat’Forme Harmonie Mutuelle. Coordonnée par la ligue Normande du sport d’entreprise et soutenue par Harmonie Mutuelle Bretagne Normandie, ce dispositif permet aux salariés d’une même zone d'activité (y compris les TPE) de faire de nombreuses activités physiques. Les avantages sont multiples : une offre de proximité, des tarifs défiants toute concurrence, tout le confort nécessaire et notamment l’usage de douches qui représente souvent une contrainte d’installation pour les entreprises. »
Quels sont les principaux bénéfices du sport en entreprise ?
QH : On considère que la pratique régulière du sport en entreprise fait baisser le taux de turn-over et, à hauteur de 32%, l’absentéisme. Par ailleurs, une étude commandée par le Medef indique que la pratique du sport permettrait des gains de productivité évalués entre 6 et 9 % par an et par salarié. Cette étude met également en lumière les gains pour la santé des salariés qui peuvent espérer un allongement de trois ans de leur espérance de vie. Quand on interroge les employés, ils mettent aussi en avant les effets positifs d’une pratique physique. Ils vantent la convivialité que cela génère, l’amélioration de leur santé et la réduction des douleurs physiques. L’amélioration de la bonne humeur des salariés a des effets positifs sur leur environnement professionnel et personnel. En résumé, le sport, c’est bon pour les salariés comme pour les entreprises.
Pour en savoir plus
Le guide pédagogique du sport en entreprise du Comité National Olympique et Sportif Français et celui du Medef.