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Quand l’entreprise gagne à s’inspirer du sport
Résumer le parallèle entre l’univers du sport et le monde de l’entreprise à l’unique recherche de la victoire est réducteur. La métaphore de la compétition, pendant de la concurrence économique, est loin d’être la seule correspondance entre les deux domaines qui partagent nombre de valeurs communes.
« N’ayez pas peur de l’échec. C’est le moyen de réussir ! »
L’adage de LeBron James, l’ailier des Lakers et médaillé d’or aux Jeux de 2008 et de 2012, peut inspirer, tout autant, sportifs, entrepreneurs, dirigeants et collaborateurs d’entreprise.
L’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) Paris 2024 est l’occasion rêvée de mettre en lumière les passerelles entre sport et entreprise. C’est d’ailleurs ce qu’ont fait plusieurs CCI – comme celles d’Aix-Marseille-Provence, de l’Hérault, du Loiret ou de la Seine-et-Marne par exemple - qui ont organisé des conférences associant des athlètes de haut niveau et des chefs d’entreprise. Ces échanges autour des notions de compétition, de persévérance et de leadership ont notamment eu lieu lors du passage de la flamme dans les territoires.
À Bordeaux, dans une région qui accueillera des équipes en préparation pour les épreuves olympiques ou paralympiques de tir, les apprentis du Campus du Lac ont pu découvrir le 28 mars 2024 l’esprit de compétition, la persévérance et le leadership de trois champions locaux dont le para-athlète Romain Ramalingom-Sellemoutou, sélectionné pour les JOP.
Ces valeurs, communes au sport et au travail, sont de fait de plus en plus au cœur des réflexions et des préoccupations des dirigeants et des managers mais aussi des attentes des collaborateurs qui entendent s’inspirer de la réussite des champions.
Dressant un parallèle entre la stratégie arrêtée par un sportif pour remporter une compétition et les ressources qu’il mobilise pour atteindre ses objectifs, un chef d’entreprise peut logiquement faire appel au témoignage de sportifs lors de conférences à destination de ses équipes. Ils sont invités à partager leurs expériences, analyser les réussites mais aussi les échecs qui leur ont permis de rebondir, en glissant au passage quelques conseils. Le transfert de savoir-faire est évident.
L’obsession de la performance, tant individuelle que collective, l’organisation d’une préparation pour une épreuve, la discipline à suivre pour franchir les étapes qui conduisent au succès et les qualités à mobiliser pour y parvenir (détermination, dépassement de soi, courage, adaptabilité, persévérance mais aussi résilience…), sont autant d’ingrédients de la recette du succès des athlètes de haut niveau qui peuvent nourrir la stratégie et le management des entreprises. Sans oublier, évidemment, la valeur du collectif et l’esprit d’équipe, y compris dans les sports individuels dans lesquels préparateurs et coachs accompagnent et soutiennent l’athlète. Ces conditions essentielles de la réussite sportive sont aussi les fondements du bon fonctionnement et de la performance de toute entreprise, aventure collective par nature.
Les témoignages passionnants de champions, le plus souvent fortement médiatisés, captent l’attention du public car ils lui font revivre des émotions partagées collectivement facilitant ainsi la mémorisation des messages. Ils expriment, de façon concrète, vivante et implicite, des préceptes de management utilisés en entreprise à l’image, par exemple, de la méthode SMART qui formalise la gestion des projets par objectifs (spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis).
S’ils s’appuient sur leur vécu, ces conférenciers ont aussi la capacité de prendre du recul sur leur expérience pour tirer des enseignements issus de leur performance sportive transposables dans le monde du travail. Ainsi en est-il, à titre d’exemple, du message porté par l’ex-coach de l’équipe de France masculine de Handball, Claude Onesta.
« La qualité numéro un d’un entraîneur, c’est d’être entraînant »
Double médaillé d’or aux JO de Pékin et de Londres, triple médaillé d’or aux championnats du Monde et d’Europe, son palmarès parle pour lui quand il témoigne sur le thème « comment j’arrive à devenir champion et à le rester tout en changeant mon équipe ». Mais il parle surtout à tous en convoquant les valeurs de motivation, de performance collective et insistant sur le rôle du manager. « Le mien consistait à faire cohabiter des gens singuliers afin d’accroître, par la collégialité, l’efficacité d’un projet. C’est aussi celui d’un manager ou dirigeant d’entreprise » expliquait ainsi au journal économique « Les Échos » celui qui est devenu le responsable de la Haute performance à l’Agence nationale du sport.
Autant de conseils applicables en entreprise et pas seulement pour motiver des forces de ventes et pour nourrir le discours d’un directeur commercial. Tout manager en entreprise peut s’identifier à un coach sportif. Comme le rappelait Michel Hidalgo, sélectionneur de l’équipe de France de football et vainqueur de l’Euro 1984, « la qualité numéro un d’un entraîneur c’est d’être entraînant ». De fait, la différence de performance entre des athlètes de même niveau tient essentiellement à la force de la motivation. Pour obtenir une synergie de son équipe et donc la plus grande performance possible, un manager doit être en capacité d’impulser une dynamique collective et insuffler une motivation optimale à chacun.
Ce n’est pas la règle du « je pense donc tu suis »
Au manager de faire partager les valeurs du collectif, de l’entraide et de la coopération (et non de la compétition) entre les collaborateurs. Comme l’encourage Claude Onesta, adepte en tant que coach de l’implication de ses joueurs dans la construction du projet du groupe, « croyez-moi, si tous participent à la construction de l’édifice, ils n’auront pas envie de détruire la maison commune ». Pour que les salariés se reconnaissent dans la culture et la stratégie de l’entreprise et qu’ils aient envie de se surpasser, cela nécessite comme dans toute équipe sportive que chacun puisse exprimer son talent au service du collectif et qu’il soit reconnu pour sa contribution à la réussite du groupe. Le manager en bon coach est un chef d’orchestre ; il ne joue donc pas en solo. Ce n’est pas la règle du « je pense donc tu suis » pour reprendre l’expression de Claude Onesta.
Le sport donne des clés de management, des repères pour fonctionner collectivement plus efficacement et pouvoir ainsi gérer plus sereinement l’incertitude et l’adversité. C’est aussi pour les salariés, une pratique que les entreprises veulent encourager de plus en plus. La Fédération Française du Sport en Entreprise l’affirme, la pratique d'une activité physique ou sportive renforce la cohésion d’équipe, la productivité des salariés de 6 à 9 % et réduit l’absentéisme de 32 %. Bien-être, santé, mais aussi cohésion d’équipe, les bienfaits du sport sont connus même s’ils ne sont pas encore majoritairement partagés. Seuls 16 % des Français pratiquaient un activité physique au travail en 2022. Mais 2024, année Olympique et du « Sport, grande cause nationale », pourrait doper la pratique sportive en France. Selon une enquête réalisée en décembre 2023 par l’Union Sport et Cycle, 58 % des entreprises et 68 % des collectivités estiment importante la mise en place d’une activité physique ou sportive en milieu professionnel. 88 % des structures qui l’encouragent, constatent une amélioration de la cohésion d’équipe... Sport et entreprise, les deux faces d’une même médaille ?