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L’Amaryllis : quand la transformation des buralistes coche toutes les cases

C’est l’histoire heureuse d’une reprise d’un commerce en zone rurale et d’une transformation en continu d’un bureau de tabac devenu commerce d’utilité locale. La gérante de « L’Amaryllis » a d’ailleurs été récompensée de son investissement en recevant le « Mercure d’Or » du Challenge national du commerce et des services 2022. À découvrir les secrets d’une réussite.

La mort annoncée du commerce de proximité en zone rurale ! La fin pressentie des tabacs ! Le bureau de tabac l’Amaryllis, situé à l’Absie au nord du département des Deux-Sèvres, a conjuré ces mauvais augures et su tirer parti du Fonds de transformation des buralistes pour faire de son point de vente un commerce de réelle utilité locale.

Dès la reprise de ce point de vente en juillet 2017 à la suite du départ à la retraite de la propriétaire précédente, Sylvie Boissinot avait « senti » le potentiel de développement de la boutique et la possibilité « d’en faire un lieu de vie et de convivialité en centre-bourg ». Après avoir été sensibilisée par la confédération des buralistes, la cheffe d’entreprise s’est tournée vers la CCI Deux-Sèvres début 2020 pour en savoir plus sur cette aide publique. La situation sanitaire liée au Covid s’améliorant, l’entrepreneure est passée à l’action début 2022.

Sophie Boissinot et Christophe BohmertSylvie Boissinot et Christophe Bohmert

« La boutique était vieillissante, il fallait la moderniser, c’était impératif ! Et il fallait, aussi et surtout, diversifier notre activité pour répondre aux besoins de la clientèle » analyse Sylvie Boissinot. La dynamique gérante de 55 ans qui, avant de reprendre le bureau de tabac, avait tenu pendant six ans un bar, restaurant, traiteur à une dizaine de kilomètres de l’Absie, sans ne rien connaître de cette activité avant de se lancer, a adopté le même crédo pour la gestion de son nouveau commerce : « quand on veut, on peut ! ». 

Surtout, si l’on ne compte pas ses heures de travail… La commerçante l’a d’ailleurs prouvé en enrichissant sans tarder dès l’année de la reprise son offre de services. Mais cet étoffement de la boutique, année après année, donnait une impression d’empilement d’articles peu attractif. Il était devenu nécessaire de revoir l’aménagement intérieur et l’aspect extérieur du point de vente pour gagner en visibilité et en cohérence. « Cette modernisation était devenue une nécessité tant pour les clients que pour nous qui y travaillons » estime la gérante qui emploie trois salariées très impliquées.

Complémentarité des services

C’est dans ce but que Christophe Bohmert, conseiller tourisme de la CCI Deux-Sèvres, a réalisé l’audit du Fonds de transformation des buralistes qui a permis, tout d’abord, de souligner les points forts du magasin. Le village de 1000 habitants est suffisamment éloigné des centres commerciaux des villes du département pour garantir l’activité de la dizaine de commerces du bourg. La situation de l’Absie sur un axe routier permettant d’accéder à la Vendée lui offre aussi une clientèle de passage (de 300 à 400 clients par jour l’été contre 250 en moyenne le reste de l’année). Et, enfin, la boutique dispose de places de stationnement, d’une façade visible de 10 mètres et d’une surface de vente agrandie de 60 à 145 m² entre 2017 et 2022.

Encore fallait-il exploiter au mieux ces atouts.« J’ai contribué à donner des idées à la gérante mais aussi à la conforter dans ses propres choix » résume Christophe Bohmert. Côté extérieur : changer les stores bannes, mettre aux normes la « carotte » (sigle des bureaux de tabacs) et optimiser l’affichage sur la façade. Côté intérieur : améliorer et replacer l’accueil dans le magasin, moderniser les achalandages et optimiser la visibilité des produits, réaménager l’espace « café/boissons » pour le rendre plus chaleureux, agrandir la surface de vente et installer un faux-plafond avec un éclairage LED.

Espace presse rénové

« De nouvelles idées utiles pour satisfaire ma clientèle qui, précise la gérante soucieuse de jouer la carte de la complémentarité des services, n’entrent pas en concurrence avec l’offre des autres buralistes de ma zone de chalandise, ni avec celle des commerçants du village ». Sylvie Boissinot n’oublie pas non plus de souligner la contribution de ses clients. « Ils sont les premiers à me demander de nouveaux produits et services et parfois même, comme ce fut le cas avec la maroquinerie, de me signaler que des confrères le proposaient » sourit la gérante.

Espace accessoires rénové

Contenter, tenter… mais ne pas s’en contenter

Car on trouve quasiment de tout dans ce bureau de tabac aux allures de drugstore : tabac traditionnel et électronique, jeux de hasard bien sûr, mais aussi, de la presse, des fleurs, des sacs et des foulards, des coffrets gastronomiques, des produits du terroir, des souvenirs touristiques, des articles de pêche et de jardinage... Sans oublier les petits plus à l’image du coin café et boissons ou du dépôt de pain les jours de fermeture de la boulangerie du village.

espace fleurs

Quand un habitué vient acheter ses cigarettes, il en profite pour faire une pause-café en lisant le journal. Quand une cliente achète un ticket de loterie, elle est tentée de jeter un œil aux fleurs ou sacs à portée de main. « La gérante a su contenter sa clientèle de proximité, la tenter avec de nouveaux produits… mais sans s’en contenter, en cherchant toujours à innover avec des services qui facilitent ou agrémentent le quotidien » synthétise le conseiller de la CCI.

Dans sa boutique, ses clients peuvent venir retirer leur colis ou peser leur courrier. Pour les faire venir, la page Facebook de l’entreprise leur annonce les nouveaux arrivages de fleurs ou de sacs. « Dès le lendemain, les clients sont là » sourit la commerçante qui ne s’arrête pas en chemin. Pour répondre à l’appel de ses fidèles clients qui se retrouvent le samedi matin pour y déguster des huîtres proposées par un ostréiculteur de la région et aimeraient bien boire un verre de blanc avec, la gérante pense demander une licence 3. Cette réussite commerciale, Christophe Bohmert se l’explique. « Sylvie Boissinot s’est formée à l’école de la restauration qui est la meilleure école du commerce. Elle a une grande qualité d’accueil et d’écoute de sa clientèle. »

Un chiffre d’affaires en progression constante

Services, c’est d’ailleurs bien le mot qui caractérise l’activité de la buraliste qui, outre la vente de produits règlementés (tabac, jeux) et celle d’articles « plaisir », propose aussi des services délivrés habituellement par l’administration ou les collectivités locales. Ses clients peuvent ainsi effectuer dans sa boutique tous les paiements publics (impôts, contraventions, timbres fiscaux, cantine scolaire…). Ce faisant, le bureau de tabac est devenu commerce d’utilité locale.

Et ça marche ! En cinq ans, le chiffre d’affaires a progressé de façon continue. Ces résultats justifient l’investissement réalisé - 60 000 euros pour l’agrandissement et l’aménagement intérieur confiés à un agenceur et à des artisans locaux - pris en charge à hauteur de 30% par le Fonds de transformation et par le dispositif « Deloitte » de soutien aux diffuseurs de presse. Une modernisation de ce bureau de tabac, qualifiée de « remarquable » par Christophe Bohmert qui juge en connaissance de cause, ayant accompagné une trentaine de buralistes dans le département. C’est la preuve, selon l’expert, que « ces points de vente en milieu rural ont un vrai potentiel de croissance dès l’instant qu’ils décident d’évoluer ».

La réussite de « l’Amaryllis » a d'ailleurs reçu un écho national. La buraliste a reçu le « Mercure d’Or 2022 » du Challenge national du commerce et des services 2022 saluant la qualité de la reprise et la performance de ce commerce installé en zone rurale. D’ores-et-déjà, Sylvie Boissinot peut se réjouir des encouragements de ses clients contents de cette redynamisation du bourg, se souvenant, en souriant, de ce questionnement d’un habitué : « qu’est-ce que tu peux faire de plus pour que ça soit mieux ? ».

Mis à jour le 21 septembre 2022