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Éco-conception numérique : une démarche bénéfique pour l'environnement et pour l'entreprise
Christophe Fernique, Conseiller environnement à la CCI Hérault, décrypte le concept d'éco-conception numérique et présente ses enjeux pour les entreprises.
Qu’est-ce que l’éco-conception numérique ?
L’éco-conception correspond à la prise en compte de l’environnement dans la conception des produits et services. L’éco-conception numérique s’applique à la production de services numériques (sites web, applications, services digitalisés, objets connectés…). L’entreprise qui est engagée dans une démarche d’éco-conception numérique va chercher à optimiser son service en prenant en compte l’environnement sur tout son cycle de vie. Il est important d’intégrer cette démarche très en amont car beaucoup d’impacts se décident dès la phase de conception, mais il y a également des enjeux sur les phases de développement, utilisation et fin de vie. Il faut enfin savoir que l’éco-conception est une méthodologie standardisée au niveau national via les normes ISO 14 006 et 14 062.

Quels sont les bénéfices d’une démarche d’éco-conception numérique pour une entreprise ?
Au-delà de l’impact environnemental, il y a beaucoup de bénéfices et ils sont différents selon la typologie du produit ou du service. Ils sont parfois difficiles à mesurer, mais ce qui est ressorti du projet GreenConcept mené par la CCI Occitanie avec l’Ademe et la Région, c’est d’abord l’amélioration de l’expérience utilisateur. Par exemple, pour un service de vente en ligne, si l’internaute met une ou quinze minutes pour acheter son billet, l’impact sera différent car l’on prend aussi en compte l’impact des équipements coté utilisateurs pour mesurer l’impact environnemental d’un service numérique. Plus on optimise le parcours client, plus on réduit l’impact environnemental.
Ensuite, une démarche d’éco-conception permet d’améliorer la visibilité et l’image de marque de l’entreprise en elle-même. Nous l’avons constaté avec de jeunes start-up en levée de fonds : intégrer cette démarche dans l’éthique de l’entreprise a contribué à leur réussite.
Une démarche d’éco-conception permet d’améliorer la visibilité et l’image de marque de l’entreprise.
Ce n’est pas systématique, mais il peut également y avoir une réduction des coûts. Par exemple, dans le big data, si une entreprise arrive à faire mieux avec beaucoup moins de données, les économies pourront se mesurer directement sur les couts d’hébergement.
Je peux également citer un autre bénéfice qui touche aux RH. Dans le numérique, où les entreprises ont des difficultés à recruter, il est clair que s’engager dans une démarche numérique responsable peut être un élément différenciant. C’est un facteur d’attrait pour éviter le turn-over ou faciliter les recrutements, à l’heure où beaucoup de jeunes actifs recherchent du sens dans leur travail.
De quels leviers disposent les entreprises pour réduire l’impact environnemental des produits et services numériques qu’elles déploient et utilisent ?
Que vous soyez un maître d’ouvrage qui souhaite faire développer un service numérique par un prestataire ou une entreprise de services numériques qui conçoit des sites web, le plus important est d’intégrer cette notion d’éco-conception numérique dès la conception, directement dans le cahier des charges. À l’échelle des 28 entreprises que nous avons accompagnées dans le cadre de GreenConcept, nous avons constaté qu’il est possible de réduire par trois l’impact des services numériques sur l’environnement en intégrant cette notion dans le cahier des charges.
Ensuite, il existe des bonnes pratiques que toute entreprise peut appliquer de façon très simple. Nous avons édité un livre blanc avec 45 pistes proposées aux entreprises. L’idée est que chacun puisse s’en inspirer pour agir, dans un premier temps, sans faire appel à une expertise pointue.
Parmi ces bonnes pratiques, il y par exemple la simplification du parcours utilisateur que j’ai évoqué précédemment et qui est essentiel. Parfois, cela consiste à développer un site internet en mobile first * ou à optimiser son hébergement sur les serveurs. Nous avons, par exemple, une société proposant de la visioconférence qui a développé un mode « éco » en invitant les utilisateurs à ne pas recourir systématiquement à la vidéo. C’est aussi une façon de sensibiliser l’utilisateur.
* Le concept mobile first consiste à concevoir un site en commençant par la version mobile et en adaptant progressivement celle-ci pour des écrans plus larges.
Existe-t-il des accompagnements pour les entreprises qui souhaitent s’engager dans une démarche d’éco-conception numérique ?
Les entreprises peuvent se tourner vers leur Chambre de commerce et d’industrie (CCI). En Occitanie, nous avons mené le projet GreenConcept, avec l’Ademe, la Région, et Digital 113 pour accompagner 28 entreprises dans des démarches d’écoconception de service numérique. Nous proposons également chaque année, à Montpellier et Toulouse, deux formations certifiantes : « éco-conception de services numériques » pour toutes les personnes qui prennent part à la conception ou au développement d’un service numérique, et « Green IT : état de l’art », principalement dédiée aux DSI des entreprises, pour réduire l’impact environnemental du système d’information. Enfin, en 2020, la CCI Hérault va proposer des « petits dej’ » et ateliers sur le numérique responsable aux entreprises mais aussi aux organisations publiques.
Enfin, pour les entreprises désireuses de mener une démarche d’écoconception numérique pilote sur un projet d’envergure, il y une opportunité à saisir avec l’opération R&D Negaoctet soutenue au niveau national par l’Ademe (une vingtaine de projets pourront bénéficier d’un accompagnement pilote sur 2020 et 2021).
Quel message souhaitez-vous adresser aux entreprises qui n’ont pas encore intégré l’éco-conception numérique ?
Il faut vraiment s’inspirer des retours d’expérience des chefs d’entreprise engagés dans l’action qui sont 100% positifs. Que ce soit au niveau des enjeux environnementaux, des RH, de la qualité du service rendu au client, il y a 1 000 raisons d’y aller ! Il ne faut pas se passer de ces démarches et il est urgent de s’intéresser à ces notions de numérique responsable.
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