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« Le cinéma d’animation est un secteur qui a de l’avenir »
Depuis 2011, l’Académie des arts et techniques du cinéma décerne un César au meilleur film d’animation. Quatre écoles du réseau des CCI forment les futurs talents du secteur. CCI France s’est entretenu avec deux diplômées de l’Ecole des métiers du cinéma d’Animation (EMCA), une école de la CCI Charente située à Angoulême.
Amélie Poirier, animatrice, jeune diplômée de l’EMCA (2018)
Pourquoi avoir choisi le cinéma d’animation ?
Après une fac de maths, j’ai étudié en fac d’arts plastiques. En dernière année de licence, je me suis rendu compte qu'à part prof, je n'avais pas vraiment de débouchés. Je voulais toujours dessiner et j'aimais raconter des histoires. Je pensais me diriger vers la bande dessinée que j'affectionne beaucoup, mais je savais que le secteur est très précaire. L'animation est beaucoup plus sûre de ce point de vue-là. Comme elle permet de raconter des histoires d'une manière totalement différente mais aussi de travailler sur les projets des autres, je me suis laissée séduire.

En quoi consiste la formation à l'EMCA ?
On y apprend les bases de chaque étape nécessaire à la réalisation d'un film d'animation : l'écriture, le storyboard (mise en scène dessinée de l'histoire), le layout (transformation du storyboard en une mise en scène 2D ou 3D), les décors, l'animation ou encore le compositing (étape qui consiste à mettre dans un même plan tous les éléments visuels). Nous avons aussi suivi quelques cours de son, un élément important des films d'animation. Les cours de modèles vivants m’ont permis d’apprendre comment le corps fonctionne afin de mieux dessiner les personnages. Il y a aussi des enseignements théoriques comme l'histoire du cinéma. J'ai particulièrement apprécié des cours moins classiques comme le mime. Ça aide beaucoup à penser les actions de nos futurs personnages.
Quels sont les atouts de la formation ?
Les intervenants sont des professionnels. Ils nous enseignent des techniques et l'utilisation de logiciels mais ils nous font aussi part d'anecdotes sur le milieu du cinéma d'animation. Ce sont aussi de bons contacts pour décrocher des stages voire un futur emploi. C'est grâce à un intervenant que j'ai trouvé mon stage en studio. A l’EMCA, le réseau se construit aussi grâce aux autres élèves. Certains sont déjà dans le secteur de l'animation depuis quelques temps et ont des contacts.
© Amélie Poirier
Comment envisagez-vous votre carrière ?
Je souhaite rester à Angoulême pour l’instant. J’ai réalisé plusieurs tests dans des studios et je viens de décrocher un poste en animation. Mon souhait serait de me spécialiser un jour dans les décors.
Votre travail a-t-il déjà été récompensé ?
En 2017, j'ai remporté le Disney Art Challenge. C’est un concours organisé chaque année par Disney. Il faut créer un concept art, une illustration, à partir d'un thème donné en rapport avec un film Disney qui sort durant l'année. Il s'agit donc d'imaginer une histoire mais de réussir, en une seule image, à en faire figurer l’essentiel. En 2017, la thématique était "Roadtrip" pour la sortie de Cars 3. Je n'y croyais pas au départ mais je suis contente de l'avoir remporté. La dotation du prix m’a permis de financer la fin de mes études et m'a offert la possibilité de faire partie du jury l'année suivante. Mon film de fin d'études, A l’intérieur, a pour sa part été sélectionné dans cinq festivals. Cela m'a aidée à décrocher mon premier emploi car j'ai pu le montrer et il a plu.
Pour découvrir le travail et l’univers d’Amélie Poirier, c’est ici
Amélie Harrault, réalisatrice de films d’animation, diplômée de l’EMCA (2007)
Pourquoi avoir choisi le cinéma d’animation ?
J’ai d’abord étudié aux Beaux-Arts. On y travaillait différentes techniques mais toujours en image fixe. A la fin des trois années, j’ai eu envie d’aller plus loin et de m’intéresser à l’image en mouvement. Je voulais raconter une histoire, travailler le son et l’aspect pictural. La richesse de l’animation m’intéressait.

En quoi a consisté votre formation à l’EMCA ?
J’y ai appris les rudiments de l’animation traditionnelle sur papier : le mouvement, le poids…
Nous avions des ateliers avec des intervenants pour explorer différentes techniques, comme le travail en volume ou l’animation en sable. C’était de bonnes bases mais en animation, on continue à apprendre toute sa vie !
Quels sont les atouts de la formation ?
La richesse des enseignements. Nous avions vraiment la possibilité d’expérimenter, de tester, de comprendre tous les possibles liés à l’animation : l’animation traditionnelle, l’ordinateur, la 3D… de mon temps, nous étions très peu par promo, une quinzaine par classe. Nous avions parfois presque des cours particuliers en fonction de notre profil. Les gens étaient très différents, certains avaint des profils techniques, d’autres avaient leur univers plastique. Je garde aussi un très bon souvenir de moments festifs entre les étudiants.
© Le monde moderne, Amélie Harrault
Quelles relations avez-vous gardées avec l’école ?
A la fin des études, l’EMCA était présente, si on avait besoin d’un banc-titre par exemple. Il y a des liens qui se sont tissés après les études : mon premier producteur était un intervenant de l’EMCA, par exemple. Cette année, je suis marraine d’étudiants de troisième année : je les suis et les accompagne dans la réalisation de leur film de fin d’études.
Aujourd’hui, en quoi consiste votre métier ?
Je suis réalisatrice de films d’animation. Je travaille les storyboards, j’organise la mise en scène, j’opère les choix graphiques, je suis la fabrication du film… En fait, je travaille au cœur du projet en collaboration avec tous les acteurs du film (les scénaristes, les animateurs…). Comme un fil rouge, je m’assure que tout soit cohérent, qu’on parvienne à quelque chose d’harmonieux et non pas un patchwork.
Comment s’est déroulé le début de votre carrière, à la sortie de l’EMCA ?
Je suis très vite partie sur du court-métrage. J’ai travaillé sur le projet de mon court-métrage Mademoiselle Kiki et les Montparnos. La phase de réalisation a été longue. Il a d’abord fallu mener des recherches puis la fabrication, selon la méthode traditionnelle, a pris deux ans car j’ai effectué beaucoup de choses moi-même. Le film a rencontré un succès qui m’a surprise ! Il a remporté beaucoup de prix dont le César du meilleur film d’animation en 2014. C’était un très très beau cadeau, car lorsque qu’on fait un film, on ne pense pas à l’après. J’ai ensuite réalisé une série pour Arte Les Aventuriers de l’Art moderne, qui mêle des archives filmées et de l’animation. Actuellement je suis en train de développer une autre série en animation pour Arte sur le XIXème siècle.
© Mademoiselle Kiki et les Montparnos, Amélie Harrault
Quel regard portez-vous sur la profession ?
Je pense que le cinéma d’animation est un métier extraordinaire et qui a de l’avenir. En tant que réalisatrice je suis au cœur de la création et c’est fabuleux ! Mais c’est aussi un métier extrêmement dur et de longue haleine. Cela demande beaucoup de patience et la nécessité d’aimer le projet que l’on porte. On dit que l’animation se porte bien France et j’ai le sentiment que le genre va s’ouvrir à un public plus large que l’animation pour enfants. Je pense qu’il faut continuer à aller vers des films à destination des adultes. On assiste de plus en plus à l’hybridation entre la prise de vues réelles et l’animation. Celle-ci trouve aussi progressivement sa place dans d’autres genres comme la série et le documentaire et c’est très intéressant.
Pour découvrir un aperçu du travail d’Amélie Harrault, c’est ici
Les écoles du cinéma d’animation du réseau CCI :
EMCA , l’école des métiers du cinéma d’animation – CCI Charente
Ecole MoPA, l’école du film d’animation et de l’image de synthèse – CCI Pays d’Arles
Gobelins, l’école de l’image – CCI Paris Ile-de-France
Rubika, l’école des talents de la création numérique – CCI Grand Hainaut
